Zephyr a grandi comme une herbe folle sur les chemins ; c'est de là qu'il tient son caractère indépendant, sauvage et insaisissable. Il n'a pratiquement aucune éducation, aucun code d'honneur. Il agit selon ses propres règles, principes. Un marginal dans ce monde bien rangé.
Malgré son absence d'éducation (il ne savait presque pas lire ni écrire avant d'arriver à Nakunaru) il est très intelligent et très logique. Ses capacités de déduction et d'analyse sont ses meilleurs atouts. C'est grâce d'ailleurs à son Q.I. assez conséquent qu'il est arrivé à combler son retard de plus de dix ans.
Il a une part sombre en lui, comme tout le monde. Mais celle-ci s'étend comme une tumeur dans son coeur. Il lui arrive parfois des accès de colère où il déverse sa haine sur tout ce qu'il croise. Pourtant, si on prend le temps de le connaître, c'est quelqu'un de patient et de sincère. Il ne vous dira jamais que la vérité. Il déteste les gens hypocrites, les menteurs ; lui qui a toujours grandi dans les faux-semblants. Il est très secret et ne dévoile jamais ses origines à son entourage. Il a perdu toute confiance dans les humains.
Il n'aime pas grand-chose, du moins c'est ce qu'il essayera de vous faire croire. Il aime les plaisirs simples de la vie, les pancakes beurrés au sirop d'érable, la caresse du soleil, le bruit des vagues qui s'écrasent sur la plage. Il aime aussi le sang. C'est une des choses qui le rapprochent plus d'un animal que d'un humain.
Il y a également une tripotée de choses qu'il n'aime pas. La plupart du temps c'est rapport à la nourriture. Et, plus que tout, il a horreur de l'humiliation. Le ridicule l'amuse, l'humiliation le met dans une terrible colère. Il est très rancunier.
Malgré sa facette sombre, Zephyr peut être très gentil et attentionné. Sous ses airs sauvages, arrogants et vulgaires se cache un adolescent fragile et timide qui a du s'endurcir pour survivre. Et c'est cette partie de son caractère qui est le plus en danger face à cette tumeur qu'est la haine.

Car Zephyr hait. Cette haine le ronge de l'intérieur, grandit au fond de son âme en étendant ses serres crochues et malsaines. Et c'est une chose dont il ne peut se défaire, une haine gravée au fin fond de sa mémoire et qui se manifeste pendant ses crises de colère, de folie. C'est un volcan bouillonnant de rage qui risque d'éclater à tout moment. Voilà ce qu'il est.



Zephyr a tout d'une bête sauvage. Une lueur de folie danse dans ses yeux, des dents acérées reposent à l'ombre de ses lèvres, son allure évoque celle d'un prédateur, sa dégaine souple est celle d'un félin. Son sourire vous arrache un frisson. Il a une présence et un charisme incroyables. Son magnétisme se remarque plus que ses cheveux flamboyants ou ses habits inhabituels. L'intensité de son regard est déstabilisante, force le respect ou la crainte. Il n'y a pas d'entre-deux dans les sensations que vous avez en le voyant. Tout n'est que crainte, respect, curiosité ou méfiance.
Zephyr est un adolescent dans les normes, avec son mètre 80 et ses 71 kg. Il a une corpulence frêle malgré sa fine musculature. Rien de particulier chez lui si ce n'est ses yeux à la couleur improbable ou ses cheveux de feu -qui n'ont tout de même pas réussi à l'empêcher d'être assassin. Il a des traits fins, des mouvements fluides, une dextérité qu'on pourrait croire innée.
Son visage est une des choses dont il prend le plus soin. Malgré son expérience en chasse et en assassinats, il n'a aucune cicatrice. Rien ne vient altérer sa peau hâlée, son nez aquilin, ses lèvres pâles. Détail amusant : malgré ses airs de prédateur, il a des mains de jeune fille, aux longs doigts délicat et effilés. Il en cache une parfois dans un gant de cuir rouge.
Il peut porter toutes sortes d'habits mais préfère ceux qui collent au corps et n'entravent pas ses mouvements, exigences qu'il a acquises au terme de sa formation d'assassin. Formation qui lui a aussi valut un corps souple et léger, une agilité certaine et une discrétion que n'éclipse pas sa couleur de cheveux voyante.



"Dans ce beau monde, tout n'est que faux-semblants, apparence et regards."
Zephyr vient d'une famille noble, pour qui rien n'est plus important que la reconnaissance et la notoriété. Ils vivaient dans un immense manoir où tout n'était que luxe, abondance, dorures et parures. Ses parents organisaient très souvent des réceptions où toute la "crème" de la société venait s'entasser pour discuter de futilités autour de somptueux banquets alors que la misère traînait sous leur porte, roulait sous leur pieds par l'image de ce village démuni entouré de landes austères.
Mais tout cela, il ne le connut pas. Il ne connut pas les boudoirs parfumés, les lits de satin, les profusions de mets délicats. Non, il connut la faim, le froid, le larçin, la violence, le sang, la cruauté, la misère. Il ne connut que ça car c'était un bâtard. Et rien n'était plus disgracieux pour le beau monde que les enfants illégitimes.
Son père, le régent de la fortune des Sully, avait une maîtresse. Lydia. Zephyr avait appris son nom quand il sut parler. C'était une des servantes qui travaillait au manoir. Après avoir appris qu'elle attendait un enfant de lui, le chef de famille la renvoya, lui interdisant de revenir ou de dévoiler sa parenté avec l'enfant. La menaçant de tuer son fils si elle le révélait, il la jeta littéralement dehors. C'est un 3 décembre glacial, où la neige commençait à tomber, qu'elle mit au monde son enfant. Elle l'appela Zephyr. Ce mot signifiait pour elle un vent nouveau, un vent d'espoir en elle alors qu'elle était au plus bas. Elle veilla sur lui jusqu'à ses 6 ans, avant de succomber d'une pneumonie qui s'était empirée.

C'est ici que commence l'histoire de Zephyr Sully.

"Survis. Par tous les moyens. La haine sera ton guide jusqu'à ta vengeance contre un père inhumain."
La graine de la haine s'insinua en Zephyr lorsque sa mère lui dévoila ses origines, peu avant sa mort. Son dernier souffle rendu brisa l'innocence dans ses yeux et il grandit trop vite. Il voulait venger sa mère, le seul être qui l'avait aimé malgré tout le malheur qu'il lui avait apporté. Son père, il allait lui faire payer. les six ans qu'il passa à se préparer, s'endurcir, furent les plus sombres de sa vie.
Il vola un couteau à un brigand qui avait trop bu et parti chaque jour chasser dans les landes inhospitalières. Une vision d'horreur pour les voyageurs, qui voyaient accroupi sur le sol un jeune garçon plein de sang, ses cheveux de feu éparpillés sur son front et portant à sa bouche les restes d'animaux fraîchement tués par le couteau qui étincelait dans une de ses mains. Il était devenu sauvage. Un animal qui avait pour instinct la haine et une volonté de survivre à tout prix.
C'est là qui connu cruauté et violence.
Des villageois organisaient des battues, des chasses à l'homme pour trouver ce démon animal dans le corps d'un petit garçon. La graine de haine sortit une pousse hors de terre.

"Il n'y a rien de plus doux que de te sentir payer, que de sentir cette lame dans ton coeur..."
L'enfant des bois avait 12 ans quand la graine de la haine faisait bourgeonner sa verte et perfide plante. Ses racines commençaient à s'incruster dans le coeur encore innocent. Impatient d'effectuer sa vengeance, le démon des landes escaladait le mur qui séparait le manoir Sully du village. Eclipse : la lune projetait sa face rouge sur le manteau noir de la nuit, sous les regards des étoiles éparpillées. Une lune aussi rouge que ses cheveux, un ciel aussi noir que ses desseins. Du sang goutte encore de ses mèches, coule sur ses lèvres. Sang de lapin, son dîner avant la scène dernière de la vie du chef des Sully. Il en jubilait déjà. Une folie meurtrière envahissait son esprit juvénile en cette nuit lugubre. Ses doigts s'agrippaient savamment aux pierres tandis qu'il cassait la vitre d'une chambre vide. Un enfant sauvage, plein de sang et de fourrure dans une pièce luxueuse, pleine de dorures et de tissus précieux. Il ne tarde pas à quitter la chambre, il court dans la demeure à la recherche de son père. Il saurait le reconnaître, il en est certain. Des cheveux rouges comme lui, il est sûr qu'il les aura.
La porte d'un bureau entrouverte, un homme à la chevelure de feu qui écrit.

C'est lui.

Un cri bestial détruit le silence ambiant. Il s'est jeté sur son paternel, totalement. Il a les pieds sur son torse, sa main tire son col, son couteau luit à la lumière du chandelier. Ses pupilles sont dilatées par la folie. Il admire avec une joie malsaine la peur qui se lit dans les yeux de sa proie. Il halète, comme une bête assoiffée de sang. Une perle écarlate s'écrase sur la joue de l'homme pris au piège. des bruits de pas se font entendre. Il n'a plus beaucoup de temps.
-Au revoir, Papa....
Ces mots sont soufflés d'une voix rauque, dans un sourire empreint d'hypocrisie et de sadisme. Le piège se referme. Le couteau se plante dans la jugulaire. Il l'a fait. La fleur de la haine éclot.
Un soubresaut. Son cœur le fait souffrir. Il retire brusquement son couteau du cou du macchabée et s'enfuit par la fenêtre sous les yeux des majordomes.
Cette nuit, le démon des landes a tué Carrey Sully.
Cette nuit, Zephyr Sully est devenu Zephyr l'insaisissable. Le démon des landes.

"Ils veulent ta peau. Tu ne peux faire confiance à personne ici. Personne qui possède la vue."
Zephyr était recherché. Pas sous nom. Mais ses cheveux de feu le désignait d'office. Il vivait dans l'ombre. Sans personne. Il ne pouvait pas faire confiance. A personne. Même pas à son mentor, dont il venait de se faire l'apprenti. Il évitait de dormir, pour ne pas se faire tuer. Il ne mangeait que ce qu'il avait lui-même préparé. Il était devenu complètement paranoïaque. Même s'il pensait que son maître était aveugle.
Il apprit tout des techniques d'assassin. Assassiner lui rapportait un peu d'argent. Et faisait fleurir la fleur. C'était l'époque du printemps de la haine. A cette époque, il ne pensait qu'une chose : "Tue, ou tu seras tué.", son père n'avait pas suivi ça et s'était retrouvé mort.
Et un soir, celui de sa seizième année, son maître disparut après lui avoir dit ces mots :
-Je vais bientôt mourir. Quand la nuit tombera, ta dernière épreuve commencera. Tu devras me tuer avant cette blessure (il désigna une profonde entaille dans son ventre). Seulement à ce moment-là, tu seras devenu un vrai assassin. Et je te donnerai quelque chose...
Zephyr acquiesça et émit un faible "oui". Lorsqu'il releva la tête, il n'y avait plus personne.

"Tu as des cheveux de sang. Sais-tu que "scarlet" signifie dans ma langue natale "écarlate" ? C'est beau."
Il sentait une odeur musquée. Le sang. Comment arrivait-il à le sentir , il ne le savait pas. Il continuait de courir sur les traces de son maître, sans chercher le pourquoi. Zephyr dans le rôle du prédateur, le vieux Jude dans celui de la proie traquée. Il était tout près. Il le sentait.
Il y eut un bruit sourd tandis qu'il plaquait son maître au sol.
-Trouvé, murmura-t-il pour qu'il sache que c'était lui.
-Bravo...
Il lui fit face. La lame levée au ciel brillait dans l'obscurité grâce à la lueur de la lune. Jude eut un sourire las. Il agita sa main, désignant son gant de cuir rouge.
-Regarde ma main. Voilà déjà la première chose que je dois te donner. Le gant de la mort. Tu ne dois pas souiller ta main par la vie d'une personne. Tu es infecté par la haine Zephyr.
Il prit le gant et changea de main sa lame pour le mettre sur sa main droite.
-Ensuite... Mon deuxième don. Je sais que tu n'as pas de nom de famille. Il t'en faut un. C'est une parcelle de ton identité.
Il marqua une pause. Pour la première fois, Zephyr vit ses yeux, qui n'étaient pas voilés. Il n'était pas aveugle. Il avait menti.
-Tu as des cheveux de sang, continua-t-il sur un ton serein. Sais-tu que "scarlet" signifie dans ma langue natale "écarlate" ? Cela donnerait... Zephyr Scarlett. C'est beau.
Une larme osa couler des yeux du jeune homme, tomba sur la joue de son maître. Son innocence revenait.
-Tue-moi. Je souffre en me vidant de mon sang.
-Adieu. Repose en paix.
Il leva la lame en prenant son élan, elle étincelait sous la pleine lune. Elle s'abattit sur le coeur du vieil homme en même temps que d'autres perles salées roulaient sur son visage.

Le gant de la mort empêcha la plante de fleurir. L'innocence l'empêcha de redevenir le démon des landes.

"Le lendemain, l'histoire de Zephyr Scarlett commençait à l'académie Nakunaru."
Plein de sang, de boue et de larmes. Voilà comment arriva Zephyr à Nakunaru. Il ne sut comment il était parvenu ici, ses pas l'avait guidé et ses yeux embrumés n'avaient vu où ils le conduisait. En tout cas, cette ville était différente de tout ce qu'il avait connu. Était-ce parce qu'il était resté coupé du monde pendant dix ans qu'il ressentait cela ? Peut-être bien, peut-être pas. Il essaya de lire le panneau pour savoir où il avait atterri, sans succès. Sa mère ne savait elle-même pas très bien lire, lui peinait alors à déchiffrer quelques mots, son mentor l'ayant plus entraîné à la chasse et au meurtre qu'à la lecture et l'écriture.
Épuisé, il fit quelques pas de plus avant de s'effondrer sur le sol, au milieu de l'allée. Son cœur, encore. Il le tiraillait, l'entraînait vers les ténèbres.
Ses yeux s'ouvrirent sur un plafond couleur crème. La peur le prit. Où était-il ? Il entendit la porte s'ouvrir, tous ses sens en alerte. Comme un animal prit au piège, il se jeta sur la personne qui venait d'arriver, son couteau brandit dans les airs, le souffle court, les yeux dilatés par la peur, la folie. Il fut surpris de voir une jeune femme, en blouse d'infirmière, terrorisée par l'adolescent qui s'était précipité sur elle -lui-même, en l'occurrence. Il se calma un peu et analysa la situation. Premièrement, il était propre. Plus de boue ni de sang. Deuxièmement, on l'avait soigné. Il avait des bandages sur les blessures fraîches qu'il s'était fait ces derniers jours. Troisièmement, personne ne le menaçait, il n'y avait que cette infirmière terrifiée. Il se détendit et abaissa sa lame.
-Désolé...
La femme sembla un peu plus soulagée, il la relâcha et s'éloigna un peu.
-Où suis-je ?
Il reporta ses yeux perçants sur elle, ce qui la fit sursauter. Il avait l'air perdu, vulnérable, comme redevenu enfant. Il se sentait à l'abri ici. Il vit quelques habits posés sur une chaise, se rhabilla sans attendre une réponse de la part de l'infirmière. Elle parla quand même, reprenant ses esprits et son ton professionnel :
-Vous êtes à l'académie Nakunaru, jeune homme, et vous n'êtes pas en état de sortir !
Ce petit bout de femme qui lui donnait des ordres avec autant d'autorité le fit sourire. Il se tourna vers elle, les traits presque adoucis.
-Vous croyez que... je peux rester ?

"La haine ne dit jamais son dernier mot."
Devant le bureau du directeur, Zephyr se tenait dignement. On aurait dit son père, un homme plein de fierté. Même après un entretien assez déstabilisant, il gardait un visage impassible. L'homme en face de lui scruta son visage, puis hocha légèrement la tête.
-Tu es le bienvenu ici, Zephyr. Il faudra t'accrocher pour rattraper ton retard mais au vu de tes capacités intellectuelles, je ne m'inquiète pas vraiment.
Le jeune homme acquiesça sagement et sortit de la pièce. L'infirmière rentra quelques minutes après.
-C'est un Sully, déclara le directeur, j'ai déjà vu son père. Encore un enfant illégitime, je suppose.
-Monsieur, cet enfant est condamné.
Un ange passa avant que la jeune femme ne sorte son dossier.
-Il a une tumeur. J'ignore comment l'enlever. Elle est... étrange. Elle progresse plus vite lors d'augmentation du taux d'adrénaline ou de brusques accélérations de son cœur, il semblerait. Ce qui est sûr, c'est qu'elle le tuera un jour ou l'autre.
Le directeur regarda par la fenêtre Zephyr dans le parc, qui s'extasiait sur la beauté du lieu.
-Il n'y a plus qu'à espérer qu'elle ne prendra pas sa vie trop tôt.

Dans son cœur, la haine attend son heure.


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